Pour vous mettre dans « la cuvée »
Le vin, une histoire franco-italienne
Vous connaissez surement cette fameuse querelle France-Italie qui oppose les deux pays pour savoir qui possède le meilleur vin et les meilleures méthodes viticoles ?! Je sais déjà que les français répondront pfff c’est nous bien-sûr ! Et les italiens auront déjà répondu qu’ils ont du vin aussi bon qu’en France ! Quant à moi, ummmmmh je vous dirai que j’aime les deux !, chaque pays à sa richesse viticole et ses propres saveurs !
Ayant vécu en Italie et travaillé dans un lycée hôtelier, j’ai pu découvrir de nombreux cépages et appellations grâce à mes élèves. A Treviso, il y avait de nombreux bars à vins et j’ai pu découvrir de nombreuses saveurs et caractéristiques italiennes sur des vins locaux ou nationaux.
Pour cet article, j’ai demandé à l’une de mes anciennes élèves italiennes, de témoigner sur le métier de sommelier et de nous parler des différences entre le vin français et le vin italien.
Quelques clichés sur le vin
En dehors de ce conflit, et avant de commencer la partie croustillante de l’article, voici quelques à priori et clichés que nous avons sur le vin :
« Un grand cru est un vin très bon » ; « Du vin bio ? ça doit être dégueulasse !» ; « Le vin de table, c’est forcément de la piquette » ; « Le rouge, c’est pour le fromage » ; « Au dessert, c’est champagne » ; « Rouge sur blanc, tout fout le camp – Blanc sur rouge, rien ne bouge » ; « Le rosé se boit frais et en été» ; «En Provence, seul le rosé est bon » ; « Avec les crustacés et le poisson, il faut boire du blanc »…
Témoignage exclusif d’une sommelière italienne
Gaia est une jeune femme de 22 ans qui a étudié au Lycée professionnel IPSSAR « Massimo Alberini”, spécialisé en hôtellerie-restauration à Trévise. Elle a tout d’abord choisi la spécialité “Service en salle et au bar” (Sala/bar en italien) puis s’est très vite orientée sur une option “Sommelier” l’année de son Baccalauréat, grâce à un concours passé à Brescia. Acharnée et passionnée, elle a même suivi des cours du soir dans une école privée, Associazione Italiana Sommelier, à Trévise.
Après le Bac (Maturità), elle a tout d’abord travaillé à Parme dans un restaurant étoilé Michelin (*). Après avoir réussi ses études en Italie, elle décide de partir à l’aventure en Angleterre pour apprendre l’anglais, direction Londra ! Sur place, elle intègre une école Wset dans le but d’approfondir ses connaissances sur le vin. Aujourd’hui, Gaia vit encore à Londres et travaille dans un grand restaurant gastronomique.
Diplômée du Gran Trofeo d’Oro de la Restauration Italienne, Montichiari à Brescia, et gagnante du 1er prix international de Sommellerie, elle n’est pourtant pas encore allée en France 😉 Cela reste tout de même sa prochaine destination.
Devenir sommelière
Pourquoi avoir choisi une formation pour devenir Sommelière (en italien, on utilise également le terme français) et peux-tu nous rappeler ton parcours scolaire ?
Dès l’âge de 16 ans, j’ai découvert le monde du vin à travers des livres. Petit à petit, je me suis passionnée pour ce domaine jusqu’à tomber amoureuse de livres sur le vin et de certains vins. Bien sûr, jusqu’à l’âge de 16 ans, je ne pouvais que goûter le vin, et depuis mes 18 ans jusqu’à aujourd’hui, je peux le déguster avec modération. J’ai commencé à étudier et à prendre des cours de sommelier dès la seconde, dans un Lycée hôtelier, puis j’ai continué dans des écoles privées.
Peux-tu nous parler de tes études sur le vin ?
Le vin s’apprend surtout avec la pratique. Evidemment, il faut apprendre le travail de sommelier et les différents types de vins qui existent dans les livres, mais 70% de ce métier s’apprend en goûtant et en analysant les différents cépages. C’est d’ailleurs un métier où il faut toujours étudier et se tenir au courant.
Et en ce moment, lis-tu un livre en particulier ?
Alors, en ce moment je suis en train de lire le livre de Nicolas Joly sur la biodynamique, qui m’ouvre de nouvelles perspectives, vraiment ! C’est l’un des premiers producteurs bio, il vit à Savennières dans la Loire en France.
Autour d’une bouteille avec Nicolas Joly : La biodynamie
Le vin, la vigne et la biodynamie
Et sinon, mon « compagnon d’étude » est un livre qui répertorie tous les vins du monde entier par zone géographique et viticole, en anglais, The World Atlas of Wine de Hugh Johnson.
Gaia, très fière de nous montrer son livre de chevet !
The World Atlas of Wine (Version rééditée)
Qu’est ce qui t’attire dans le vin et qu’est-ce qui te plait dans ton métier ?
Ce qui m’attire dans ce domaine, je dirais tout ce qui est en rapport au vin, allant de la grappe au vin lui même. J’aime cette sensation de pouvoir satisfaire les clients qui viennent manger au restaurant. Puis, je dois dire que je découvre le monde des vins biodynamiques là où je travaille maintenant, c’est à dire non traités, uniques et non conventionnels. Ces types de vins, plus ils s’aèrent dans le verre et plus ils “s’ouvrent” comme on dit, c’est une découverte pour moi. Ce qui me motive au quotidien, c’est de vouloir apprendre un peu plus tous les jours.
Quelles différences y a t-il entre un vin français et un vin italien ? Et surtout au goût ?
Les vins italiens et les vins français ont des histoires et des cultures différentes, on ne peut pas les comparer.
Si leurs histoires les différencient, qu’est-ce qui les distingue au goût ? Pour ta part, quel type de vin préfères-tu en général ?
C’est comme si tu disais Bordeaux et Toscane, deux grands noms mais avec des caractéristiques particulières. Les vins que je préfère sont des vins appelés Orange wine, c’est ce contact avec la peau lors de sa fabrication qui me plait, en somme.
Peux-tu nous expliquer ce que c’est exactement l’Orange Wine ? Qu’entends-tu par « contact avec la peau » ?
L’Orange wine est un vin blanc, fabriqué plus ou moins comme un rouge, mais avec un contact direct avec la peau du raisin et affiné dans des amphores. C’est pour cela qu’il a une couleur orangée. Il est également, s’il est bien produit, très intéressant à étudier car il permet vraiment de comprendre la composition du territoire d’où il provient (type de sol, cépage…).
Aurais-tu des bons vins italiens à nous conseiller ou même des vins dont tu raffoles tout particulièrement ?
Moi, je vous recommande les vins de petits producteurs ou vins bio, par exemple en Vénétie vous avez l’Angiolino maule major. Voici également quelques noms de producteurs : Python paille en France (Loire) puis, Jérôme Prévoste (champagne gueux), en Italie Gravner (Friuli Venezia Giulia), Emidio pepe ( Abruzzo).
Pourrais-tu nous donner quelques conseils pour choisir un bon vin italien dans un magasin ?
Il faut déjà regarder le degré d’alcool écrit sur la bouteille, le nom du producteur… la question est vaste. Par exemple, Château cheval Blanc, le terme château dans ce cas là est un critère de qualité, Ribolla gialla di Gravner est aussi un très bon vin. Cela dépend de ce qu’on mange et aussi des goûts de chacun.
Et comme Prosecco, qu’est-ce que tu nous conseilles ?
Le Prosecco c’est trop commercial. Je dis cela parce que le Prosecco est un produit très connu, très prisé, et donc très utilisé, par conséquent on néglige la qualité dans le but de faire de la quantité. Après il y en a des bons, mais très peu. Fort heureusement il existe encore des producteurs qui travaillent à l’ancienne et qui prennent soin des raisins et de sa fabrication.
En Italie existent-ils des musées ou événements sur le vin ?
Il n’existe pas vraiment de musée du vin mais il y a de nombreux événements, certains sur les vins naturels comme Vinnatur près de Vicence ou encore Vinitaly annerita à Vérone.
Où travailles-tu maintenant, dans quel type de restaurant ?
Actuellement, je travaille en Angleterre dans un restaurant étoilé qui s’appelle Fera at Claridge’s. J’aime beaucoup l’endroit où je travaille, c’est vraiment un très bel établissement. Ce restaurant ne collabore qu’avec des petits producteurs, ils achètent de la nourriture en circuit court, c’est à dire tous types de légumes et de viandes qui proviennent de fermes locales. Ce qui fait que même les vins sont achetés dans cette optique là, par conséquent je ne travaille qu’avec des vins naturels, dont certains biodynamiques. Ils sont tous achetés à de petits vignerons qui produisent tout juste 3 000 bouteilles par an.
Comment fais-tu pour satisfaire les clients ou conseiller un vin ?
Il faut essayer de comprendre ce que le client désire, du mieux possible et en essayant de suivre ses exigences, ainsi je choisis le vin.
Pourquoi as-tu décidé de travailler à l’étranger ?
Parce que je voulais vivre une expérience unique, découvrir une autre approche hors de mon pays natal.
Pourquoi ne pas avoir choisi la France comme destination ? Ne dit-on pas que la France est le pays du vin par excellence ?
J’ai choisi Londres avant tout pour la langue, mais plus tard je compte aller en France.
Quel est ton plus beau souvenir en tant que sommelière ?
Mon souvenir le plus beau… hum… chaque jour est un beau souvenir je dirais. La façon dont j’apprends un peu plus tous les jours mon métier, etc…
Quel est ton prochain objectif ?
Mon prochain objectif, disons plutôt mon prochain souhait, serait de pouvoir venir travailler quelques temps en France.
Y’a-t-il une ville ou une zone qui t’intéresse tout particulièrement ?
Oui, tout particulièrement Bordeaux, mais n’importe quel endroit me plairait, disons plutôt dans le Sud de préférence.
Pour finir, aurais-tu une anecdote à nous raconter ?
En effet, un jour il m’est arrivé une situation que je qualifierais plutôt d’agaçante : un client voulait commander un verre de vin, mais lorsqu’il a remarqué que je ne portais pas la broche du sommelier, il a refusé que je prenne sa commande. En fait, la broche du sommelier est une grappe de raisin que seul les experts sommeliers portent sur leur tablier ou leur tenu de sommelier, étant donné que je ne suis pas encore experte, il a du penser que je n’étais pas apte à proposer un bon vin… Qui sait ?
Au bout de combien de temps peut-on porter cette broche et que signifie être expert ?
Seulement ceux qui connaissent la liste complète des vins, qui connaissent les vins à la perfection ont le droit de la porter, cela dépend donc de plusieurs facteurs. Pour ma part, pour l’instant, j’ai une connaissance générale.
Merci beaucoup Gaia pour tes retours d’expériences !
A paraître prochainement, un article sur la route des vins italiennes et françaises.
Attention à ne pas abuser du sujet de l’article !
Sympa cet article ! J’aime beaucoup les photos de Gaia, elles sont rigolotes.